En Chine, l’amertume des habitants inondés dans les zones sacrifiées

Dans les campagnes du Hebei, la province qui entoure Pékin, le choc des inondations historiques, qui ont fait des dizaines de morts a laissé place à l’amertume. Parfois même à la colère : mercredi 9 août, des habitants de Gaobeidian, une ville appartenant à la préfecture de Baoding, au sud de Pékin, se sont rassemblés devant un bâtiment officiel pour protester contre le manque de réactivité des autorités. Ils ont été dispersés sans ménagement par la police.

Le soir, la grande place qui fait face au gouvernement local était protégée par des centaines d’agents, d’après des vidéos partagées en ligne. La veille, des scènes similaires avaient eu lieu à Bazhou, une autre ville affectée par les inondations, un peu plus au sud. Sur une vidéo, les habitants, qui font face à des policiers portant des boucliers, se plaignent d’avoir été aspergés de spray au poivre et entonnent en chœur le slogan : « Rendez-nous nos maisons ! »

Alors que l’eau s’est retirée de la plupart des villages, l’heure est au nettoyage, mais aussi à l’évaluation des dégâts et aux demandes de réparations. Les plaintes sont multiples : à l’arrivée de l’eau, les habitants ont pointé du doigt le manque de préparation des autorités, et l’absence d’alerte ou d’évacuation de leurs villages, alors que d’autres ont été évacués à temps : le Hebei assure avoir évacué plus d’un million de personnes. Ceux qui sont restés sur place ont déploré la lenteur des secours, qui s’explique sans doute par l’ampleur de la catastrophe : Pékin a enregistré les plus fortes chutes de pluie depuis cent quarante ans.

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Malgré le caractère exceptionnel de cet événement, les habitants sinistrés savent que leurs villages ont été « sacrifiés ». Situées dans des « zones de décharge », dans les plaines au sud de Pékin, les zones les plus affectées n’avaient jamais été aussi gravement inondées par le passé. La différence est qu’entre-temps, la municipalité de Xiong’an, située un peu plus à l’est et qui accueillait de nombreuses zones humides, a été choisie par Xi Jinping pour devenir une ville nouvelle, visant à accueillir des institutions et entreprises pour désengorger Pékin. Plus question, donc, de laisser cette zone être inondée.

« J’ai perdu ma maison et je risque de perdre la tête »

D’après les médias d’Etat, les autorités ont décidé d’ouvrir les vannes dans sept zones de contrôle des inondations afin d’empêcher les rivières et les réservoirs de déborder à Pékin et dans l’autre métropole de la région, Tianjin. Le chef du Parti communiste du Hebei, Ni Yuefeng, a déclaré qu’il avait ordonné « l’activation des zones de stockage et de dérivation des crues de manière ordonnée, afin de réduire la pression exercée sur le système de contrôle des crues de Pékin et de construire résolument une “douve” pour la capitale ».

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